Après plusieurs années et albums de lente dégringolade vers une décadence nettement moins jouée qu’à ses débuts, M. le clown vairon revient aujourd’hui en costume sobre avec un dixième album surprenant et pertinent.
Quand une icône du spectacle connue pour ses excès scéniques et ses costumes prend de l’âge, on flirte souvent avec l’auto-caricature à mesure que succès et agents s’empilent. Ni Elvis, ni Johnny Cash n’ont été épargnés. Mais si le premier est mort dans son gras (ou caché sur une île avec Bob et Kurt, c’est selon) le second a trouvé quatre derniers souffles à la mesure de l’artiste grâce à un producteur têtu capable de le sortir du personnage de foire à la saucisse qu’il était devenu.
Sans vouloir chercher de comparaison outrancière, Marilyn Manson semble avoir trouvé son Rick Rubin en la personne de Tyler Bates. Cet habitué des BO de films a su virer les plumes, gratter l’excès de plâtre et garder l’essentiel d’un Manson non pas plus mature, mais peut-être plus adulte, plus en sobriété.
Alors que les derniers « efforts » fournis par la bête n’avaient fatigué que les auditeurs malchanceux, on trouve dans The Pale Emperor un son rafraîchissant. Sans réinventer la roue, des pièces comme Killing Strangers ou Warship My Wreck nous montrent un Marilyn qui semble s’être trouvé et assumer plus sereinement ses thèmes de prédilection. Les armes et Dieu, c’est mal.

Du neuf avec du vieux
Dans les reverbs et la fumée, The Pale Emperor dévie la trajectoire de Marilyn Manson vers une terre plus blues, sans y aller complètement. On y croise quelques trouvailles et des tempi plutôt entraînants.
Même si c’est clairement très produit, ce pas forcément chargé. La voix trouve un espace plus confortable entre les chœurs et les effets de style divers. Il y a de l’espace dans les chansons et de la profondeur derrière les instruments. Les instrumentations se veulent plus organiques, dans des effets de slide, de dobro, de piano plus résonnant et moins bidouillé.
On s’attendrait à voir cet album joué dans une tournée des clubs, avec un groupe de blues de l’enfer, en costume et cravate, sans grand-guignolesque. De toute manière, à 50 balais est-ce encore une bonne idée de monter en slip sur des échasses pour faire rire les petits copains?
Pour ça, il reste le single Deep Six, qui rappelle tout de même que les refrains aux guitares industrielles, il sait faire, qu’on apprécie ou non. À mon sens, une pièce très dispensable dans un disque probablement charnière qui ouvre un large champ des possibles pour la suite.

Marien Joly