Alors que parmi les passants pressés par la pluie, je me fraye un passage entre les gouttes de cette triste et fraîche soirée d’automne, j’arrive au petit campus le cœur léger. Ce soir les musiciens de Whisky Legs sont de passage à Montréal et investissent le lieu pour le lancement de leur premier album «Basement Confessions».
Ce petit Campus s’est transformé pour l’occasion en club de jazz avec ses chaises installées tout autour de la scène, ambiance cosy, il ne manque plus que la fumée de cigarette pour se transporter dans l’ambiance feutrée d’un club de New York pendant les années folles…

La salle est bien remplie, plutôt surprenant quand on considère que Whisky Legs n’est pas un groupe local et lorsque le band commence sa première chanson intitulée «Basement», on sait tout de suite qu’on va passer une bonne soirée. La guitare est caressante, le jeu de drums blues teinté de jazz est subtil, la basse est solide et groovy et la voix de Maude est cristalline, sensuelle, et possède ce grain définitivement blues qu’on aime tant.

On rentre tranquillement dans le show, un peu à l’image de la musique de Whisky Legs, «You are», «King Street» sont deux chansons mid-tempo pop bluesy, au fur et à mesure que la soirée avance, on se surprend à être complètement immergé dans l’univers suave et bluesy de Whisky Legs.
«Carry On» apporte une petite touche world avec son petit riff à la guitare qui me rappelle la «vibe» de l’album de Robert Plant avec le Strange Sensation «Mighty ReArranger», superbe !

Tandis que la ballade «So Far Away» donne à Maude l’occasion de nous faire apprécier son registre vocal, la justesse de son chant et le velouté de son timbre, sa présence scénique est évidente, pleine de charme, je dirais même envoûtante.
Les chansons s’enchaînent pour nous faire voyager à travers différents territoires musicaux, du blues bien sûr à la pop en passant par le funk, le jazz, la soul même. Ce qui surprend le plus chez Whisky legs c’est cette richesse et cette diversité musicale à la fois maitrisée et improvisée à l’image des solos de guitares de Guillaume qui sont particulièrement inspirés et qui apportent un petit grain de folie à l’ensemble plutôt tranquille.

Presque une douzaine de chansons déjà, Maude s’improvise Janis Joplin sur une interprétation très réussie de «Piece of my heart», sans donner dans la surenchère vocale, elle nous livre une version certainement moins «puissante» que feu Janis mais vibrante de douceur, pleine d’émotions et de sensibilité apportant de la sensualité au texte.

Changement de décors à mi-show, les tabourets sont de mise, Whisky Legs devient un duo acoustique avec Pascal qui le temps d’une chanson passe du drums à la slide guitar pour un intimiste «Too close to the sun».
Ce même Pascal qui un plus tard nous régalera d’un solo de drums de haute volée.

«Scarlett» est un autre excellent blues lent sur laquelle Maude fait valoir son vibrato de voix poignant et Guillaume son fin jeu de guitare, la dynamique du band est excellente, le plaisir de jouer se lit sur leurs visages, leur alchimie est évidente également et l’énergie qui se dégage est étonnante compte-tenue du style, l’audience le leur rend bien d’ailleurs, l’accueil est plus que chaleureux, il semble que le temps se soit arrêté…

Puis vient «Needy Woman», incontestablement l’une des chansons les plus «catchy» de la soirée qui touche désormais à sa fin, suit «Too late» une autre chanson qui fait la part belle à la guitare acoustique puis l’encore de deux chansons pour clôturer une soirée toute en douceur et certainement très haute en couleur.

Après un salut sous les applaudissements d’un public aux anges, qui a assisté à un show d‘une très grande qualité, Whisky Legs tire sa révérence et nous laisse rentrer sous la pluie toujours battante avec la sensation que sa musique a été écrite pour égailler une soirée d’automne comme celle-ci.

Texte: Ronan Le Hec’h