La magnifique ville de Terrebonne, à quelques dizaines de kilomètres au nord-est de Montréal, a vu naître, au cours de la dernière décennie, une panoplie d’auteurs-compositeurs et groupes de grand talent; nous n’avons qu’à penser à David Jalbert, Olivier Lamarre, Simon Lacas et Route St-Louis. Le tout dernier se nomme Toby Laflamme. Il nous présente son tout premier opus «Corps étrangers», auto-proclamé un album de «franco-crash» et réalisé par l’ex-Dorothée, Vincent Dargis.

Dans «Corps étrangers», Laflamme nous livre une partie de son âme en toute simplicité dans un mélange bien dosé de musique festive, d’indie-folk lo-fi et de poésie francophone dans la pure tradition de Serge Fiori. Nous ne sommes pas bien loin non plus de la belle époque des Cowboys Fringants, des Colocs et d’un groupe important qu’on tend à oublier avec les années; Polémil Bazar. Les arrangements dépouillés mettent de l’avant la plume de l’auteur-compositeur qui écrit avec beaucoup d’aisance des textes profonds et honnêtes.

«Si ton sourire est un mensonge avec des dents

Si tu carbures à la haine pour aller de l’avant

Si ton cœur est gris et rongé par l’ennui

S’il n’y a que des rêves brisés au fond de tes souliers

Si tu as la langue bien pendue, mesquine comme un serpent

et si tes mots ne servent qu’à saigner à blanc

Si pour toi la vie n’est qu’une course folle

Qu’il faut gagner à tout prix pour ne pas que ta joie s’étiole

Passe ton chemin…»

Lui-même se considère comme un simple «gosseux de chansons», probablement une façon de démontrer sa propension à l’artisanal et au «fait-le toi-même», mais son talent va bien au-delà du simple chansonnier gratteux de guitare. On a droit ici à un artiste complet et brillant qui participe à redonner aux mots tous les honneurs et la place qui leur reviennent dans la création de chansons. On voit toute l’étendue du talent poétique de l’auteur avec la pièce «Slam de guerre» et ses références à Boris Vian et à Grand Corps Malade.

Sans jamais tomber dans la dénonciation et le blâme, et surtout sans jamais se prétendre porte-parole d’une génération, Laflamme est très critique de sa société, mais toujours d’un point de vue individuel. Il n’est pas question d’incitation à la révolution, mais plutôt d’exprimer le désarroi d’un être sensible et humain dépourvu de repères dans un monde en pleine transformation.

Une flèche, d’ailleurs très pointue, est lancée en direction du show-business et des cliques qui contrôlent bien souvent certains milieux musicaux: «Parce qu’on a des contacts, on est big en tabarnak». Une autre façon d’affirmer son refus de jouer la game de la popularité et du mensonge, en d’autres mots du «discours stérile qui vaut moins que le silence».

Malgré certaines inégalités dans la proposition, la musique de Toby Laflamme à tout pour plaire à un large public. La pièce titre à d’ailleurs tout pour devenir l’hymne de l’été 2016. Plusieurs pièces de l’album sont particulièrement réussies, mais la pièce «Corps étrangers» est un chef-d’œuvre pur et simple et nous avions le mandat de vous la partager. Faites de même. Partagez.

À voir le 21 janvier au Bistro Culturel Cœur de Village à St-Isidore-de-la-Prairie,

le 30 janvier au Transit à Terrebonne et le 4 février au Major Tom à Montréal.

 

Meilleures pièces

— Corps étrangers

— La Gran» Porte

— Le regard méprisant des étoiles

Texte: David Atman

tobylaflamme.com