ZEAL AND ARDOR est le projet musical de Manuel Gagneux. Un musicien suisse n’ayant pas froid aux yeux et ayant créé auparavant un autre projet du nom de BIRDMASK. Après la parution de multiples singles et du EP «Devil is fine», il nous propose un hybride chaotique, inattendu et somme toute très téméraire: un Black Metal amalgamé à de la musique Noire américaine «spiritual» issue et inspirée de la période de l’esclavagisme. Un gospel créé à même la sueur, le labeur et la souffrance, une musique lancinante, chaude, endolorie, spirituelle avec un métal froid, sec, nordique, violent, Européen, rapide et sans merci. Antithèses unies dans ce désir de création. Le tout serait né d’une proposition venant d’internautes répondant à l’appel de Manuel de lui suggérer, le défier, de créer avec deux styles forts différents, un album concept crédible et surtout divertissant. Un monstre est né. La folie créative de Mr Gagneux porte fruit. Ice-T a déjà fait et fait encore un excellent métal alliant culture noire et métal, avec son projet Bodycount. Living Colour nous à déjà fait vibrer avec leurs riffs et leur musique funky fusion métal, pour ne nommer que ceux-ci. Bref ce n’est pas d’hier ce type de mélange. Mais ici on va vraiment plus loin. Ce pari est réussi avec brio. Cela ne va pas sans dire que mes oreilles ainsi que mon cerveau ont dû briser certaines conceptions et règles bien ancrées quoique mon ouverture d’esprit reste assez musclée!

Nous avons droit à 16 pièces assez courtes allant du Pasteur  Noir déversant ses chants lyriques lugubres qui semblent provenir du plus profond des bayous humides de la Nouvelle-Orléans, au froid intense et sanguinolent digne du panthéon nordique. La pochette représente un symbole (sigil) satanique. Le «artwork» représente fort bien les intentions de l’album. Le tout débute par une intro prenante donnant le ton de façon convaincante. Un chant noir entrecoupé de guitares planantes «Blackgaze» (un autre hybride,» Shoegaze» et «Blackmétal», eh oui le «Blackmétal» a grandement évolué et s’est fixé à d’autres styles depuis quelques années! [Alcest, les Discrets, etc.].

«Gravedigger’s chant» nous plonge dans un univers glauque avec pour soutien, la voix éraillée et blues de Mr Gagneux me rappelant un peu Tom Waits. Aussi cela ne va pas sans me rappeler le travail de Betty Bonifassi ayant fait une excellente recherche sur le chant «Spiritual» noir et qui travaille actuellement avec Robert Lepage et sera du Festival de jazz de Montréal 2018. Jetez-y un œil si le sujet pique votre curiosité!

«Stranger Fruit» est un voyage ésotérique malsain qui se voulait un jeu d’exploration à la base. Mais aux dires de Manuel Gagneux, le tout aurait pris une ampleur insoupçonnée. Deux univers s’entremêlent dans ce big bang, choc culturel dérangeant et plaisant tout à la fois, mais gagnant à être apprivoisé tranquillement. Énormément de talent est infusé ici. Un génie à l’œuvre qui semble s’amuser fièrement de nous, et ça me plaît. Une collaboration avec Mike Patton dans le futur? Ce serait génial! Il se produira cet été au festival Download, Graspop Metal Meeting et Hellfest. Nous aurons la chance de l’accueillir cet automne à Montréal!

Un bel avenir attend cet artiste audacieux et fort original!

Sur ce je vous laisse, les cloches sonnent au loin et le chœur se fais entendre et ne saurait attendre. J’y vais de ce pas…. l’appel est irrésistible…

https://www.zealandardor.com/

https://youtu.be/sImbYJIo68o

Note: 9/10

Texte: Martin Desbois