Le 7 février, les ex-Chics Clochards lançaient le premier album de leur nouvelle aventure : Le Squall. Un disque qui évoque la tempête, sans la provoquer.

Sans rapport avec le poisson mangeur d’hommes, un « squall » est un coup de vent aussi intense que court, accompagné de pluie ou de neige. Une claque bien connue des habitants de la côte. La mer et les falaises sont des thèmes très présents dans les textes de Le Squall, qui n’a pourtant gardé d’un « squall » que sa promptitude – 30 minutes pour 8 pièces.

Ce premier album bénéficie d’une production très propre. Les arrangements sont riches de cuivres et de cordes, les thèmes musicaux sont solides, comme dans Squelette de Sirènes. La cohésion du groupe permet une certitude des grooves, que ce soit pour porter un violon expérimental et surprenant ou une mélodie très funk sur Kalashnikov. Les textes font preuve d’une poésie cohérente, l’expérience est là, c’est indéniable.

Cela étant dit, et cela n’engage que les oreilles de l’auteur, l’interprétation trop polie et l’atmosphère mélancolique trop souriante peuvent rapidement laisser une envie d’implosion. Où sont les débordements, où est la folie, le bouton de chemise qui pète?

Trop de perfection et trop de contrôle nuisent à l’ensemble qui persiste sur une ligne bien droite et peine à décoller.

Réputation live

Les apparitions sur scène des Chics Clochards étaient réputées énergiques. Le Quai des Brumes était donc assez logiquement rempli et les fans présents pour ce lancement visiblement attendu.

Le Squall a offert une prestation presque sans faille et confirmé la solidité des musiciens, aussi bien individuellement qu’en tant qu’unité. Encore une fois le groove était là et a bien vite embarqué le public qui dansait… bien gentiment.

Le manque de risque ressenti sur l’album se confirme sur scène. Le rock festif du groupe est définitivement trop bien peigné, l’énergie est trop gentille. Malgré l’attitude parfois trop théâtrale,

ça ne dérapera pas. C’est d’autant plus frustrant que la section rythmique et les cuivres en ont sous la semelle. Les apartés sonores du violon mériteraient la pichenette qui les ferait basculer dans la folie balkanique d’un Emir Kusturica live.

La réaction positive du public conquis pourrait laisser penser que je suis un mauvais coucheur. Mais après avoir dansé sur l’album au complet, le public bienheureux ne sentait toujours pas la sueur ; argument olfactif qui vaut ce qu’il vaut.

Folie furieuse

En première partie du spectacle, Crémant Impérial nous a offert l’inverse. Ce duo vocal en robes fluo complètement barré faisait pourtant très peur au départ. L’in-esthétisme total et assumé pique les yeux comme les oreilles. Ça piaille, ça minaude, ça glousse, ça ne groove pas. On croirait voir les deux tatas vieilles filles qui sentent le tabac et le mauvais vin, toujours attablées dans le même coin dans les fêtes de familles.

Un sourcil levé, on embarque violemment dans la folie du duo en n’ayant pas la moindre idée d’où cela pourrait bien nous mener. La perplexité des premiers instants réalise le tour de force de ne jamais disparaître, même lorsque pointe l’émerveillement. À voir, ne serait-ce que pour faire partie du mystère insondable de ces deux folles furieuses.

Texte : Marien Joly