Samedi soir au Bar le Ritz se produisait devant une salle comble Caspian, avec The Appleseed Cast en ouverture, deux groupes de post-rock venus tout droit des États-Unis. C’était d’ailleurs la dernière date d’une tournée de cinq semaines à travers l’Amérique du Nord, qui nous a amené des membres nostalgiques et énergiques. The Appleseed Cast a bien amorcé la soirée avec un son assez puissant, brut et une énergie sans bornes visibles, surtout dans le cas du batteur (j’en aurais pris sois moins de sa part ou plus de la part des autres; c’était un peu disparate par moments). Malgré le tempo un peu instable, ils jouaient tous très bien ensemble, en général sans décalage et sans accrocs, et nous emmenaient dans de belles montagnes russes d’intensité… …mais The Appleseed Cast sont à Caspian ce que les montagnes russes sont à l’Everest: ça ne joue pas dans la même ligue. Avec leur myriade de pédales (particulièrement de délais et de réverbération; les trois guitaristes avaient deux délais ou plus dans leurs gargantuesques pedal boards), l’atmosphère et la puissance étaient au rendez-vous. Le son était malheureusement beaucoup trop fort à mon gout, comme quoi saccager le canal auditif des fans semble être une mode dans le post-rock/drone metal, tellement que quelqu’un s’est plaint à la police pour le bruit… Même s’il me semble évident qu’une salle de spectacle ait à dégager un certain bruit, je crois qu’une plainte de la sorte donne un ordre d’idées au niveau sonore de la chose. Néanmoins, l’expérience était immersive au maximum, et d’une immersion accentuée par un système d’éclairage relativement minimaliste (quatre spots, quatre lumières motorisées, deux stroboscopes et quatre cabinets en vitre ornés d’une plume, en référence à leur dernier album Dust And Disquiet) manié avec soin et savoir-faire. L’éclairagiste, que j’ai regarder œuvré, connaissait chaque note de chaque pièce sur le bout des doigts, littéralement, et ça paraissait dans le rendu final. Avec de la musique à si grand déploiement et avec de si longs développements, le visuel fait toute la différence pour le spectateur, et à ce niveau Caspian est difficile à battre; les six membres ont comme une seule et même énergie, manifestement infatigable. Ils se tortillent avec violence sur le stage d’une façon étonnamment homogène, ayant pour effet de rendre encore plus explicite la puissance de leur musique, et ce sans avoir besoin de jouer incommensurablement vite, et sans nécessairement être des virtuoses. J’ai été un peu déçu de ne pas entendre du tout d’aucune des voix, qui sont déjà si peu présentes dans la musique de Caspian, et j’aurais aussi aimé une plus grande variété stylistique au niveau du choix des pièces (on induit l’algorithme de la montagne russe assez rapidement), mais en général, comme à leur habitude, Caspian livre la marchandise. Avec Le Ritz en salle comble après avoir rempli de justesse le Cafe Campus un an auparavant, on peut espérer voir Caspian dans une vraie salle qui rendra justice à leur son dans un futur proche!

Texte: Hugo Tremblay