Quand j’ai commencé, il y a 5 ou 6 ans à travailler pour Daily-Rock.ca, j’étais loin de me douter que ce parcours m’emmènerait également à faire des entrevues avec les plus grands musiciens de la planète.
Donc, en collaboration avec mon émission de radio Thorn of ROCK, qui est diffusée tous les mardis soirs de 19 heures à 21 heures sur les ondes de www.rock-fm.ca j’ai eu la chance, et surtout l’honneur d’interviewer, pour la deuxième fois, un des plus grands guitariste de l’histoire du rock. Et j’ai nommé Monsieur Joe Satriani.
Voici donc un résumé de ma conversation avec cet artiste hors du commun.
Daily-Rock Québec:
Dans une semaine, le 25 mai, tu seras de retour à Montréal pour un spectacle au Mtélus, es-tu content d’être de retour à Montréal? Quelle est ta relation avec Montréal? Car on sait que tu as un album-DVD en concert tourné à Montréal!
Joe Satriani:
En effet, la première fois que nous avons joué à Montréal, c’était il y a presque 30 ans, dans une salle qui s’appelait, je crois, le Métropolis. Quiest devenu le Mtélus maintenant. J’y ai emmené plusieurs groupes là-bas, notamment le G3.
C’était donc un peu fou d’apporter autant d’équipement dans une si petite salle. Car pour tourner en 3D, ça prend énormément d’équipement. Et les caméras sont énormes. Et jouer devant cette foule montréalaise était complètement fou. Une salle parfaite pour ce genre de captation. Pas trop grande, pour ne pas que les gens se sentent seulement spectateurs, mais assez grande pour l’équipement et pour que les fans se sentent faisant partie intégrante du spectacle. C’est facile de trouver une salle partout dans le monde pour ce genre de captation. Mais il faut s’assurer que la salle ne soit pas froide et que les gens se sentent intégrés. Nous ne voulions pas que l’assistance regarde une équipe filmer un spectacle, mais plutôt que les caméras fassent presque partie des meubles. Et que les gens les oublient. Donc le Métropolis était une salle de choix. Nous sommes devenus un ce soir-là.
DRQ:
Tu n’es pas au Québec pour seulement un soir. Mais tu seras au Québec pour 3 soirs de suite. Le 25 à Montréal, et les 26 et 27 à Rouyn-Noranda.
JS:
Oui nous avons, je crois, un genre de festival de la guitare là-bas.
DRQ:
Oui en effet à Rouyn-Noranda, je suis convaincu que tu n’as jamais été là n’est-ce pas?
JS:
En effet, plus que ça. Je regardais notre itinéraire de tournée, et je ne suis même pas sûr de pouvoir prononcer ce nom. Comment ça se prononce au fait?
DRQ:
C’est à environ 500 km au nord de Montréal. Je te conseille donc d’apporter un manteau d’hiver. N’arrive pas là avec seulement un chandail à manches courtes.
JS:
Il fait froid même au mois de mai? WOW! Merci de m’avertir.
DRQ:
Ce ne doit pas être un gros festival, car je n’en ai jamais entendu parler. (Festival des guitares du monde d’Abitibi-Témiscamingue).
Mais tu as joué dans ta carrière énormément de festivals, grands comme petits. Tu aimes y jouer?
JS:
Les grands festivals en Europe sont tellement bien organisés que c’est vraiment agréable d’y jouer. Même avec les plus petits, on sent vraiment les vibrations et l’amour des gens.
Pour notre part, étant donné que c’est de la musique instrumentale, nous aimons mieux jouer en début de soirée ou en fin de soirée. Car nous n’avons pas un chanteur pour bien rendre la musique. Mais en soirée, nous avons au moins l’éclairage. Ce qui aide au spectacle. C’est comme aller voir un orchestre qui joue du Mozart. Si le spectacle est dans une salle, ou dans un parc, le chef d’orchestre ne gère pas son orchestre de la même façon. Pareillement pour nous. Nous nous adaptons à l’environnement. Mais pour ce festival en particulier à Rouyn-Noranda, c’est une salle de spectacle. Donc il n’y aura pas de problème de ce genre.
DRQ:
As-tu une ligne directrice pour chaque album que tu sors ou tu peux aller dans toutes les directions?
JS:
Je crois que tu as raison. Oui j’ai une ligne directrice. Je m’assois quelques mois avant l’enregistrement et je me mets des lignes directrices. Ça m’aide à garder le focus, ça m’aide aussi à enlever des idées de ma tête. Des idées qui peuvent me paraître bonnes, mais qui ne le sont pas en réalité. Donc pour le dernier album What happens next, déjà en tournée, j’avais déjà dans ma tête toutes mes idées et où je voulais m’en aller 6 mois avant. Je voulais vraiment mettre un point final sur mon dernier album et passer à autre chose. Je voulais avoir une approche dénudée pour l’enregistrement. J’ai donc mis de côté beaucoup de chansons, et gardé seulement celles qui étaient parfaites avec ma ligne directrice dont je te parlais tantôt.
DRQ:
Après 30 années à faire de la musique, as-tu remarqué que ta base de fans a changé au fil du temps?
JS:
Évidemment. Nous avions avec Surfing with the aliens de très bonnes ventes de disques, mais à la radio ça ne jouait pas. Donc nous étions seulement invités à nous produire dans des clubs qui sont évidemment pour les 21 ans et plus. Parfois même pour deux spectacles par soir. Donc ça limitait énormément le public devant moi étant donné qu’ils ne pouvaient pas entrer dans le bar.
Quand j’ai commencé à faire des salles pour tous, je voyais beaucoup de changements devant moi : que ce soit des jeunes ou bien que ce soit des personnes qui étaient confortables d’être assis dans un théâtre. Ce qui m’a donné la chance de jouer beaucoup plus de choses que dans un club. Par exemple, jouer dans un bar fou à Washington D.C. ne te permets pas de jouer des pièces tranquilles. Mais dans un théâtre, tu le peux. Ce qui a fait évoluer beaucoup mes spectacles. Et avec la vente de mes albums qui était en hausse, j’étais invité dans des festivals partout dans le monde ce qui a attiré des foules de tous âges. Et j’ai tellement de disques sur le marché, que chaque personne présente peut vraiment connecter ensemble.
DRQ:
Parlant de succès, tu as été nominé pour 15 Grammy Awards, mais tu n’en as jamais gagné 1 seul!
JS:
Exact. Mais tu sais quoi? Je pense que ce qu’il y a de positif là-dedans c’est qu’ils me connaissent et ils connaissent ma musique. C’est ce qui me rend heureux. C’est vraiment positif.
DRQ:
Donc tu n’es pas en colère de ne jamais avoir gagné?
JS:
NON!!!! Pas du tout. Ma première nomination était pour l’album Surfing with the aliens en 1987. Juste le fait d’être nominé m’a permis de vendre 10 millions de copies d’albums, en plus de jouer partout dans le monde. Et en plus, tu as entendu parler de la malchance des gagnants du Grammy pour la révélation de l’année? Souvent, ça devient des One Hit Wonder. Alors je suis bien content de ne pas l’avoir gagné et je suis en même temps très content de mes nominations. C’est comme le Magazine Rolling Stones. Tu veux qu’il te connaisse, mais tu veux aussi qu’il ne te porte pas trop d’attention.
DRQ:
Dernière question. Qu’est-ce qui te ferait acheter une chaise berçante et te dire: C’est fini! J’arrête tout ça et je ne fais plus rien?
JS:
Mon Dieu!
Je crois que je n’arrêterai jamais de faire de la musique. Je pourrais arrêter par contre de faire certaines choses. Par exemple, de faire des tournées, ou arrêter autre chose. Mais pas la musique.
Par exemple, je n’arrêterai jamais d’aller dans des écoles pour jouer devant des jeunes ou des enfants. Ce qui est très différent que de faire des émissions de télé. Je déteste faire des émissions de télé. C’est tellement prenant et énervant. C’est la pire chose au monde.
DRQ:
Même après 30 ans?
JS:
Ha oui! C’est très loin que de jouer devant tes propres fans dans un club, ou dans un festival. Devant tes fans c’est la meilleure chose. En tournée. Je ne peux pas décrire comment c’est merveilleux. Il n’y a rien qui bat ça je te le dis. J’aime aussi faire des choses pour des bonnes causes.
DRQ:
Merci beaucoup pour le temps que tu m’as donné Joe. J’étais pas mal moins nerveux que la première fois que je t’ai parlé il y a 5 ans.
JS:
Ce fut un plaisir de te reparler mec. Et à la prochaine!
Entrevue téléphonique réalisée le 17 mai 2018 par Laurent Lépine