En ce dimanche pluvieux, l’Olympia allait faire place à un événement haut en couleur. Le groupe Heilung, originaire de plusieurs pays du nord de l’Europe, et qui est vite devenu une sensation internationale grâce à leurs envoûtantes et intrigantes vidéos, allait présenter quelque chose comme un événement hybride entre le spectacle musical et le théâtre païen.

Le concept nous apparaît surtout comme étant particulièrement astucieux et inventif. Par contre, on ne peut faire fi des scandales récents et tout le débat sur l’appropriation culturelle. Alors que le spectacle SLAV fut annulé, alors que le groupe Slaves a reçu des menaces de mort, que le groupe Whore devra peut-être songer à changer de nom, la mise en scène de Heilung serait, il me semble, pour certains extrêmes-gauchistes criante d’appropriation culturelle. On ne pourrait pas présenter un tel événement avec la culture amérindienne par exemple, mais semblerait que l’extrême-gauche se fout pas mal des Vikings. Cette mise en scène comprenant les costumes, les plaintes d’animaux, la fumée et le décor à la Game of Thrones viennent complètement dévorer le minuscule espace laissé à la musique. Celle-ci toujours infiniment minimaliste et d’autant plus répétitive. Elle se veut mantrique mais elle est plutôt bourrée de clichés et de mélodies simplistes entendues mille fois dans n’importe quels films d’époque.

La salle est comble, on n’y voit rien. Le public semble apprécié, la chanteuse reçoit des applaudissements pour je ne sais trop quelle raison. Ce n’est pas qu’elle chante mal mais disons que ses capacités vocales sont, disons-le simplement, ordinaire. Si on dépouillait un peu la mise en scène, on y trouverait derrière que très peu de substance. J’ai connu des jams au Tam-Tam, les dimanches après-midi qui offraient sensiblement la même teneur en divertissement, en valeur créatrice et en moment de recueillement pseudo-religieux.

Ce que nous espérions tous être un événement des plus originaux n’était en fait, artistiquement, que très peu inspirant, sinon que pour y apercevoir les costumes et y apprécier la mise en scène cinématographique. En réalité, nous nageons en plein kitsch; une bande d’Européens qui se déguisent en Viking pour jouer quatre notes par chanson. Je ne saurai dire si ce que nous avons vu était un spectacle de musique. Tout au long de la représentation, on se sent plutôt au cinéma, devant des acteurs plutôt que des musiciens. Chacun joue bien son rôle, mais musicalement c’est pauvre. J’ai plutôt eu l’impression d’assister au tournage d’un film expérimental comprenant une trame sonore moyennement travaillée, mais avec des costumiers à l’apogée de leur art. C’est une musique qui ne fonctionne, à mon sens, qu’avec l’image, une musique à image. Les photos du spectacle pourraient en réalité être suffisantes.

Ce ne sera pas la première fois que je contredirai l’ensemble des critiques de la métropole, ni la dernière fois où j’assisterai à un spectacle monotone que tous semblent pourtant appréciés. Il ne faut pas se méprendre, Heilung donne effectivement une prestation captivante et impressionnante, mais est-ce que c’est de la musique?

Sur ce, je retourne écouter Dead Can Dance.