C’est en chevauchant les nuages islandais, complètement en transe, que nous avons assisté à ce qui s’annonçait déjà comme un rêve éveillé. Sigur Rós était de passage en ville pour deux soirs à la Place-des-Arts. La voix éthérée et angélique de Jonsi Birgisson allait bercer un public fidèle depuis plus de vingt ans.

Le groupe post-rock qu’on a découvert au début du millénaire grâce à la voix de Radiohead et Björk n’a plus besoin de support ni de présentation. Depuis longtemps, le groupe fait fi de toutes les conventions en créant une musique des plus minimalistes qui sait plaire à un large public de mélomanes. C’est le silence qui est à la base de la musique créée par Sigur Rós. Le silence comme lieu d’expérimentation. Le vide comme lieu de tous les possibles, l’endroit précis où l’imagination peut laisser libre cours à toutes ses élucubrations, à tous ses rêves les plus fous. C’est la continuité du projet de John Cage.

Le silence est de mise dans le public aussi. Ce dernier démontre un grand respect envers l’art de Jonsi, on pourrait entendre les mouches voler. Personne n’ose même filmer avec son cellulaire, on se croirait en dehors du monde moderne. Enfin.

L’ambiance visuelle est tout à fait exceptionnelle. Chaque pièce possède son propre type d’éclairage et de projection. L’on se retrouve parfois en nature, parfois en ville dans un univers technocratique, parfois dans le parfait mélange des deux. Le jeu d’éclairage permet l’immersion totale du spectateur. Les places assises permettent elles aussi d’entraîner le spectateur dans une quête céleste en suivant le rythme de la musique. Pour avoir vu le groupe à plusieurs occasions, dont au Métropolis sans sièges, il est de mise, voire tout à fait essentiel d’être en position de repos lors de l’écoute de la musique de Sigur Rós. Le corps doit rester mou pour être transporté, pour mieux planer. Et l’on pouvait les apercevoir, tous ses corps s’envoler au-dessus de nos têtes.

Depuis 2013, Sigur Rós évolue en tant que trio suite au départ du guitariste Kjartan Sveinsson et ça n’enlève en rien de leur efficacité. Les pièces sont interprétées avec une justesse et une précision sans failles. Les anciens succès du groupe, dont Daudalagio, et mon ultime favorite; Ny batteri sont bien intégrés au spectacle afin de laisser place aux compositions plus récentes. Un concert tout à fait exceptionnel.

Texte: David Atman

Merci à Thomas MazerollesSors-tu.ca pour la photo