Samedi le 2 mars est une journée que j’avais hâte de voir arriver. Suite à un après-midi de pratique avec mon groupe, je prenais la route pour Sherbrooke avec deux de mes camarades, dont Max, le guitariste du groupe Kolony. Trois formations québécoises nous préparaient une soirée endiablée.Hollow étant le plat de résistance, Sanguine Glacialis en guise d’accompagnement, ainsi que Infected Karma en tant qu’entrée.

Soirée organisée, soit-dit en passant, non pas par une agence de booking active et familière de nom, mais plutôt par une demoiselle sherbrookoise du nom de Katrine Schram, une bonne amie à moi qui a un grand coeur dans lequel il y a beaucoup de place pour le metal de la scène locale. Une chance que nous avons pris la route à l’avance, car les conditions météorologiques n’étaient pas très favorables à un trajet fluide. Mais ce n’est pas grave, nous sommes armés de patience, car le déplacement en vaut la peine, et nous avons de la bonne musique pour le trajet : Deviated Inner Spectrum de Pronostic ainsi que Days of Judgment de Eclipse Prophecy. Après une multitude de péripéties pour se stationner, nous voilà enfin au bar Le Magog. C’était la première fois que je mettais les pieds dans ce bar et je dois avouer que c’est un endroit très sympathique et une excellente salle pour les spectacles. Un fait intéressant est qu’il y a en quelque sorte deux sections, c’est-à-dire qu’en entrant on se trouve dans la section bar et que la salle du spectacle se trouve de l’autre côté. Il est donc possible d’avoir une conversation audible en même temps de regarder le spectacle puisqu’une fenêtre donne une vue sur la scène. Assez discuté, passons au spectacle.

Infected Karma est la première formation à nous défoncer les tympans. Un quatuor originaire de Sherbrooke qui fait du death metal explosif. On peut sentir une énergie jeune et vivace à travers leur matériel et leur présence sur la scène. Les gars savent bien utiliser toute la place sur la scène et également remplir tout l’espace de la salle avec leur sonorité. On retrouve dans leur musique un intéressant mélange d’influences empruntant au metalcore et au deathcore. En toute honnêteté, le style du groupe sonne quand même familier, je veux dire par là que je n’ai pas vraiment trouvé de nouveauté musicale dans la prestation de Infected Karma. Mais ce n’est pas nécessairement un reproche que je leur fais, seulement une observation. Les gars ont l’air de bien savoir ce qu’ils font et, ou ils s’en vont avec ça. Une chose est sure, ils sont capables d’emmener un public à quelque part de tangible. Je dois avouer que j’ai de la difficulté à apprécier la musique qui est en ligne sur leur page (c’est peut-être plus la qualité de l’enregistrement qu’autre chose, car je trouve leurs riffs quand même bons), mais il semble avoir beaucoup progressé entre l’époque de ces enregistrements et aujourd’hui. Bien que j’ai trouvé qu’il manquait un peu d’assurance à certains moments dans l’animation du frontman, pour être plus précis je parle du contact de son regard avec le public lorsqu’il s’adresse à celui-ci, pour annoncer les titres des chansons, je trouve que le gars remplit quand même très bien son poste. Je ne sais pas depuis combien de temps le groupe est actif, mais ils semblent évoluer à un très bon rythme. Ils sont habiles et ont beaucoup de potentiel, c’est certain que je vais garder l’oeil ouvert (l’oreille plutôt dans ce cas-ci je crois bien) pour d’autres de leurs concerts s’ils en ont dans ma région, et j’ai hâte de voir du nouveau matériel sur le web!

C’est maintenant le tour à Sanguine Glacialis de monter sur scène. Je sens monter en moi une énergie frénétique et absurdement enthousiaste. Il va de soi après une telle mention que ce n’est pas la première fois que je les vois en spectacle. Ils parviennent à m’envouter à chaque fois avec brio. Il faut avouer que leur musique c’est vraiment mon truc, c’est une combinaison bien exécutée d’éléments qui me font vibrer. Un death métal très théâtral et mélodique qui transporte beaucoup d’émotions et d’ambiances. On retrouve une bonne grande dose d’essence féminine à travers le son de Sanguine Glacialis, premièrement avec le vocal opéra féminin qui est habituellement à l’avant-scène, mais exceptionnellement pour ce soir-là, la chanteuse n’y était pas dû à un empêchement. Il y a également une deuxième voix féminine dans le groupe, il s’agit de celle de la claviériste Maude. C’est d’ailleurs elle qui chantait les arrangements de voix de la chanteuse absente lors de ce spectacle. N’étant familière avec le chant classique que depuis très peu de temps, elle est très bien parvenue à remplir ce rôle qui n’est habituellement pas le sien en plus de faire son ouvrage instrumental. Ils ont également une demoiselle à la batterie, ce qui fait un total de 3 filles et 3 gars. C’est surement plus un adon qu’un aspect intentionnel, mais ça fait comme une sorte d’équilibre, puisqu’il y a également un équilibre dans le son du groupe entre l’essence féminine et le côté plus agressif du metal, car ils se marient bien l’un à l’autre. Une de leurs pièces que j’aime beaucoup, s’intitule « The Buccaneers’ lament » (La lamentation des boucaniers). Je crois qu’elle représente le genre de chanson tragique que les pirates chantaient en choeur avant de se faire éxécuter, comme par exemple « Hissons nos couleurs » du film Pirates des Caraïbes. Je dis elle représente, car il y a aussi une histoire livrée avec un son metal autour du refrain qui est chanté a la manière d’une lamentation. C’est intéressant de voir ce contexte présenté dans les éléments musicaux d’un tel groupe metal. À la fin de la chanson, la musique s’arrête, et tous chantent le refrain a capella, le bassiste (qui est d’ailleurs le deuxième chanteur principal du groupe qui fait les « growls ») chante d’une une voix chamanique avec une maitrise impressionnante des tons graves. Ce chant en choeur possède un pouvoir ma foi très rassembleur et on est aisément invités à se laisser bercer par la mélodie d’âmes tourmentées et chanter tous ensemble. Il y a aussi « La valse des condamnés » qui fait cet effet-là, la musique étant basée sur un vrai tempo de valse, et le groupe nous invite a valser durant la pièce. Chanson durant laquelle la claviériste quitte son instrument pour venir chanter le refrain en solo à l’avant-scène, de sa voix écorchante. Cette demoiselle est vraiment talentueuse et elle a beaucoup d’énergie sur scène. J’aime beaucoup les échanges vocaux qu’elle fait avec le bassiste durant la partie 1 de leur pièce « Timeless ». Il y a la pièce « Alice au pays des Pendules » qui est à glacer le sang, mais à la fois élégante. Enfin, un autre élément qui vient beaucoup chercher le public est quand le bassiste dépose son instrument pour aller chercher un tuba, car il joue un passage au tuba dans la partie 2 de Timeless. Le passage était difficile à entendre lors de ce spectacle, probablement dû à l’état de ce dernier. Car je ne l’ai pas encore mentionné, mais certains des membres du groupe étaient atteints d’une vilaine grippe. L’un des guitaristes avait été récemment opéré à la hanche et était donc limité dans sa mobilité à cause de cela (il était préférable qu’il reste assis). Malgré ces inconvénients.. les membres de Sanguine Glacialis ont tous donné un très bon spectacle dont je suis reparti avec un t-shirt et leur CD « Dancing with a Hanged Man ».

Hollow viennent nous donner le coup de grâce. C’est un groupe ma foi aussi très théâtral, mais dans un autre contexte. Quand on y pense bien, Sanguine Glacialis était un très bon groupe pour ouvrir pour eux, car leur contexte visuel sanglant et macabre va très bien avec celui de Hollow, qui est pour sa part squelettique (plus du côté du guitariste que les autres) et ténébreux. D’ailleurs, il semble y avoir une belle chimie entre les membres de Hollow et de Sanguine Glacialis. Je dis cela parce qu’en premier lieu j’ai vu leur batteur Blake donner un coup de main à Pascale de Sanguine Glacialis pour arranger la batterie. Ça va un peu de soi puisque c’est lui qui fournit le kit de base sur lequel elle a joué, mais d’un autre coté je crois qu’il n’est pas nécessairement obligé de faire cela, mais que c’est par professionnalisme et par générosité. Également, la claviériste de S.G portait une camisole de Hollow lors de la soirée. Le groupe Hollow ont une recette très intéressante, mélangeant des éléments du metal symphonique avec ceux du death metal et même du black metal. Leur thématique visuelle est intéressante, chacun a sa particularité, l’utilisation du sombre et du clair dans les maquillages donne un aspect chaotique, par exemple le guitariste a le torse entier maquillé en plus du visage, les os d’une cage thoracique y sont représentés. Les contrastes sont judicieusement utilisés dans les maquillages et tenues de scène des membres du groupe, ce qui donne un look vraiment accrocheur. Les gars de Hollow ont vraiment une énergie spectaculaire sur scène, en plus que leur matériel a vraiment beaucoup d’étoffe. L’énergie est communicative, la musique, mélodique et expressive, tantôt lourde tantôt rapide. Le guitariste est un musicien très habile, on peut sentir son expérience de son instrument, et sa capacité à nous présenter son matériel de manière solide tout en ayant une prestance scénique du tonnerre. Il est d’ailleurs également guitariste dans le groupe de death metal Québécois Your Last Wish. C’est compréhensible que ce soit eux qui ont gagné le concours local pour jouer sur la scène du Heavy MTL l’an dernier, car c’est vraiment un groupe distingué du lot et leur style est accessible en plus d’être brillamment développé. Il y a de très beaux contrastes entre le mélodique et l’aspect sombre dans la pièce « Vlad ». Particulièrement au moment ou il y a un passage qui sonne très mélodieux pendant lequel le bassiste (Snow) fait un « tapping » sur sa basse. Il faut le préciser, Vlad est en fait le nom de leur ancien bassiste qui est décédé depuis 2007, donc j’imagine que cette chanson est une sorte d’hommage à Vlad. Certains passages de la pièce me rappellent un peu Stratovarius et Kalmah en même temps. Quand vient le temps de la pièce « Birth », le chanteur appelle une de leurs acolytes à se joindre à leurs rangs. De qui s’agit-il? C’est Maude, la claviériste de Sanguine Glacialis. Je saisis d’avantage maintenant, la raison pour laquelle elle portait les couleurs de Hollow. En plus d’être un support pour les artistes avec qui elle partage la scène au sens figuré, c’est possiblement aussi une sorte d’uniforme pour partager la scène avec eux au sens propre du terme. Sa participation au vocal seulement apporta une dimension intéressante dans le son de Hollow. On a droit a un duo de vocal auquel on ne s’attendait pas, commençant par des échanges et plus tard les deux chantent ensemble. On a droit aussi à un moment dramatique lorsqu’elle s’effondre après avoir poussé un cri de mort. Elle reste là, gisant sur le sol quelques instants alors que le chanteur poursuis seul, puis se relève avec la gestuelle d’une personne en pleine agonie, se tiens debout et droite à nouveau et relance sa puissante voix de plein fouet sur le public. C’est franchement un duo bien combiné, les deux voix se soutiennent très bien. Ce fut un spectacle qui vient clore très bien une soirée pendant laquelle chacun des groupes nous en ont mis plein la vue.

Francis Labadie