Les Français de Rãgarãja ont sorti récemment un clip qui a fait un certain buzz sur les réseaux sociaux. Suite à cette sortie, leur chanteur, Euryale nous a contactés afin de le diffuser et on en a profité pour lui poser quelques questions afin de faire connaissance avec ce groupe qui devrait faire parler de plus en plus de lui à l’avenir.

Tout d’abord, merci de répondre à nos questions. On ne va pas se le cacher, c’est le visuel de votre clip qui a fait que beaucoup de monde, Québec compris, a regardé la vidéo et parlé de vous, car pour ma part, je ne vous connaissais pas du tout. Peux-tu nous parler du groupe, les débuts et ceux qui t’entourent sur scène? Tout d’abord un mot pour vous dire qu’on est vraiment très content de répondre et de s’adresser au public québécois! Un de nos guitaristes vit actuellement au Québec, il vous adore. En fait, au début de l’histoire j’étais gratteux et chanteur dans un autre projet (dacryma) que je cherchais à relancer avec une nouvelle chanteuse. Puis, suite à un gros pépin sur le tournage d’une vidéo (je me suis retrouvé à l’hôpital 15 jours après une très grosse chute sur le crâne), j’ai eu le déclic de vouloir passer au chant, et de mener mon projet en tant que figure de proue. J’ai continué avec Fabien le bassiste et Stan, le second guitare du projet (qui par ailleurs habite à Montréal jusqu’en août esti’), on a réutilisé les rushs vidéo pour notre premier clip « Sheitan », et on a cherché d’autres musiciens pour finaliser le line-up. On a fini par trouver Cyril (batteur) et Chris (guitare), et maintenant on est au complet pour attaquer les concerts ! Niveau musique, on mélange un peu de tout, mais on reste surtout sur la vague moderne (Djent, metalcore, deathcore) avec des influences comme Hacktivist, Heart of Coward, Eths, L’esprit Du Clan. Personnellement, j’écoute énormément de rap aussi, et j’essaie de donner un débit rap à ma voix, tout en gardant un cri et une texture métal. C’est pour ça qu’on aime dire qu’on fait du rap/métal. On aime bien aussi l’électro (notamment la dubstep) on en a mis un peu, peut-être qu’on en mettra encore plus par la suite !

RÃGARÃJA est le nom de votre groupe, pourquoi avoir choisi ce nom et j’imagine qu’il a une signification particulière? Hahaha! Cette question revient souvent ! Alors pourquoi ce nom ? Parce que dans l’hindouisme c’est le roi des passions. Or, on parle beaucoup des passions dans les textes et on utilise souvent les émotions, les sensations pour les décrire. Contrairement aux autres religions qui quand elles parlent des passions en parlent en mal, RÃGARÃJA n’est pas une « mauvaise » divinité. Il n’y a pas de bien et de mal dans ce nom, et c’est tant mieux, car les passions sont aussi créatrices que destructrices. À l’origine le morceau « Sheitan » aurait dû s’appeler « Accoutumance pour le fléau », mais je me suis dit que j’allais faire un petit clin d’œil en appelant le morceau et l’EP ainsi.

Dans tout ce que j’ai pu lire, tout le monde met en avant les textes, notamment celui de votre dernier titre  »Dans le Miroir ». J’imagine que c’est toi qui composes tes textes, d’où te vient ton inspiration, car il faut l’avouer, celui-là, il est assez dur ? J’essaie de mettre mes tripes sur la table. De mettre ma perception, ma vision du monde dans des mots, et de sélectionner soigneusement les mots qui décrivent ce que je vois, ce que je ressens, et ce que je comprends. En fait, tout est inspirant, je pense, on peut vraiment puiser son inspiration dans n’importe quoi. Pour « Dans Le Miroir », j’évoque en fait l’identité sexuelle que la société nous renvoie. La société étant symbolisée par « le miroir ». Je décris une relation sexuelle fictive, avec toutes mes tripes, toute ma cruauté, toute l’intensité qu’il peut y avoir dans ces moments. De ce fait le texte est « dur ». Il est cru, mais la réalité est crue, cruelle même, et il ne faut pas s’en cacher et vivre dans le tabou. C’est à nous de mettre des mots dessus, et de mettre les bons mots. Comme dirait Sylvain Larocque un humoriste bien de chez vous, « tu peux dire n’importe quoi, mais tu peux pas le dire n’importe comment ». Je suis content que tu me dises que tout le monde parle des textes, ça veut dire que les gens se sentent concernés, donc que quelque part, ce que je dis, eux-mêmes le ressentent. Ça veut aussi dire que les gens les lisent, et ça pour moi c’est important que les gens profitent qu’on chante en français pour s’intéresser VRAIMENT à ce que disent nos chansons.

Toujours pour  »Dans le Miroir », la vidéo est également assez dure, pourquoi avez-vous choisi de montrer des images aussi crues, violentes même ? (je précise que je ne suis pas choqué). Pourquoi ? Ca faisait longtemps que l’idée me trottait dans la tête. J’en ai marre des images où on voyait des femmes secouer leurs culs, faire des déhanchés sexuels, et ce, quel que soit le thème de la chanson. J’en ai marre de voir toujours des clips où on montre des femmes qui sont dégradées, mais qui sont contentes d’être dégradées. Comme si c’était la norme. Comme si ça se passait comme ça, et que ça DEVAIT se passer comme ça. Nous on a pris le parti inverse. Au lieu de partir de quelque chose de sale et d’en faire du beau, du soi-disant sexy, pour laver le cerveau des gamines de 12 ans sur MTV, on a pris quelque chose de beau, parce que le sexe, le plaisir sont des belles choses, et on l’a sali à notre manière. Pour faire réagir les gens plutôt que de les endormir. Nous, on ne parle pas de désir, on ne dit pas à la femme qu’elle doit se foutre à poil et secouer son cul pour pouvoir séduire le bad boy du coin. On parle du plaisir égoïste du bad boy du coin et on s’adresse à la femme, en lui disant de briser tout ça, tout cet engrenage social qu’on décrit dans les paroles. Ça, c’est notre message initial. Mais on n’aime pas quand il n’y a qu’une seule interprétation possible, on a tourné le tout de façon à ce qu’on puisse interpréter les paroles ET le clip de différentes façons et c’est parfait. Car il n’y a pas qu’une seule et unique vérité, à vous de voir la vôtre et vous approprier ce qu’on a voulu vous transmettre à travers ce clip. Pour ça aussi, il fallait des images violentes, et crues, pour être SÛR de ne pas laisser les gens indifférents, comme ils le sont quand ils voient de la nudité « habituelle ». Il fallait que ça soit plus violent que leur quotidien. On est dans une société ou les gens t’ignorent si tu ne les agresses pas encore plus qu’ils ne le sont déjà dans les médias.

Je reste encore au clip que vous venez de sortir, il y a une grosse différence esthétique par rapport à ce que vous aviez fait dans le passé, est-ce qu’il y avait une volonté de votre part de créer un buzz en montrant de telles images ou c’est pour vous ce qu’il y avait de mieux pour illustrer le texte de cette chanson ? Évidemment il y a un peu des deux, comme je le disais dans ta question précédente, l’idée me trottait en tête depuis longtemps. Au moment où j’ai décidé de me charger seul de la direction artistique de ce clip, il fallait que les images collent au mieux avec ce que je voulais dire, et dans mon esprit j’ai carte blanche, j’ai pu faire et j’ai fait au final tout ce que je voulais. Après faut comprendre que les clips des groupes de métal sont quasiment TOUS les mêmes. C’est bien, mais ça ne sert à rien de faire ce qui a déjà été fait. Si tu regardes 90% des clips de jeunes groupes de métal, tu vois le groupe jouer, à la limite avec un tout petit scénario à côté et c’est tout. Même si parfois c’est super bien filmé, au final la formule reste la même. Tu ne racontes rien ou presque de l’histoire de ta chanson. Et nous on a fait pareil au début dans nos deux premiers clips, on a pris le risque zéro, pour un résultat zéro. Puis on a réfléchi un peu, et on s’est dit qu’il fallait sortir des clous le plus vite possible, et avoir de quoi se faire remarquer sur le long terme. Et on ne fera pas ça qu’une fois. Je n’ai pas envie de m’arrêter à un seul clip dans ce genre et m’en servir juste pour faire parler. Non, dans l’idée on veut se créer une marque de fabrique visuelle aussi forte que notre identité sonore. Et il faut qu’on soit sur nos clips absolument différents de ce qu’il se fait à côté. J’ai un pote dans un groupe de Hardcore (pas encore officiel) qui veut tourner dans une maison de retraite avec que des vieux. C’est putain de rock n’roll je trouve. Ou alors il fait des choses bizarres avec les mamies, mais ça il ne m’a pas dit. (Rires)

Si je ne me trompe pas, vous allez sortir un EP prochainement, quels sont vos objectifs avec cette sortie ? Yes ! En fait « Dans Le Miroir » est le 5e et dernier titre de notre EP « Sheitan ». On a donc fini de sortir tout l’EP sur internet, on va les recevoir bientôt en dur. À ce moment, on fera les démarchages pour obtenir des chroniques, on organisera des jeux-concours avec les radios, et les magazines. Puis surtout on les diffusera le plus possible en concert à petit prix. On veut que les gens soient récompensés quand ils viennent nous voir. Le virtuel c’est cool, c’est super pratique pour se lancer sauf que moi j’aime les gens, mais putain je les aime vraiment quand ils sont en face, qu’ils viennent nous voir sur scène, et qu’on se serre la patte après les show, qu’on parle, qu’on boive une bière ensemble.

En France tout comme au Québec j’imagine, la scène métal doit être assez riche, comment ça se passe pour vous pour au niveau des concerts, est-ce que c’est facile ou alors bien compliqué ? Ce n’est pas si compliqué de trouver des dates, mais de faire des dates vraiment gratifiantes avec du monde, des bonnes conditions de jeu, c’est plus complexe! La scène métal est riche et beaucoup des gens qui vont aux concerts sont des gens qui pourraient être sur scène. C’est un milieu dur pour les jeunes groupes, il faut s’accrocher et mettre tout pour réussir à tirer son épingle du jeu. On commence à booker quelques dates et vite se projeter vers les réseaux de salles de bonne qualité. Puis on commence à prendre des contacts pour jouer en Suisse, en Belgique, et…au Québec! Ce serait une super expérience de débarquer par chez vous pour faire une tournée d’une petite dizaine de dates. Le public québécois a l’air chaud, et pas mal de Québécois nous soutiennent dans notre démarche de venir, ce qui nous touche. Donc dès qu’on pourra, on débarque, promis.

Le groupe No One Is Innocent a été choisi pour faire la première partie d’AC/DC au stade de France, si vous aviez l’occasion de partager la même scène qu’un groupe de ce calibre, lequel ça serait ? Honnêtement je n’ai pas trop réfléchi. Pour ma part je pense qu’HACKTIVIST ça me botterait, Heart of Coward aussi, Gojira, Eths. Bon après si l’occasion de jouer avec Metallica se présente…bon pourquoi pas ? (rires)

 

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