Je me suis rendu lundi dernier, le 10 novembre 2014, dans un lieu plutôt inhabituel pour celui qui court les spectacles partout en ville, c’est à l’Abreuvoir, en plein Quartier Latin, sur Ontario, que le groupe laurentien Ours Blanc conviait ses fans pour une soirée de rock-francophone. Le 3$ demandé à la porte vous donne droit à une bière, aucune raison de ne pas y être.

Très bel endroit que cet Abreuvoir, le plancher est moins collant que le défunt Café Chaos, définitivement plus propre que l’Alizé, et plus chaleureux que le St-Ciboire. Pas de scène à l’Abreuvoir, toutefois, le petit racoin aménagé pour les groupes est bien mis en évidence. On ne cherche pas à cacher le groupe des clients réguliers comme dans la plupart des bars. L’endroit est déjà bien rempli dès mon arrivée à 21 h, principalement pour un lundi soir. Tout y était pour une soirée plus que réussie.

Ours Blanc, secret bien gardé de la scène québécoise, roule sa bosse depuis maintenant 3 ans et ça parait. Dès les premiers accords, on perd la temporalité. On se croirait de retour en 70 lors des rassemblements de la St-Jean sur le Mont-Royal. Ours Blanc c’est un groupe de beatnik sans le macramé. Ours Blanc c’est des hippies intellectuels qui n’ont rien à faire des codes et des conventions.
À la limite entre Harmonium et Octobre, influencé par les grands du prog, King Crimson ou Gentle Giant, mais toujours plus acoustique que heavy. À la rigueur on pourrait penser au groupe de Eric Goulet, Les Chiens, mais avec des envolées un peu plus lyriques à la Radiohead. Le groupe enchaine chanson par-dessus chanson sans perdre de leur efficacité. Les mélodies sont suaves, réfléchies et franchement foutument bien composées. Nous avons même eu droit à un Alabama Song version gypsie et à Belzébuth que le public s’est empressé de chanter en choeur avec David Bernard, le chanteur du groupe. Outre quelques problèmes techniques rien n’a empêché le public d’y trouver son compte et le groupe d’avoir un immense plaisir à jouer. L’ambiance est conviviale, sans artifice et les chansons sont jouées avec une grande simplicité.

Leurs textes, dans la langue de Molière -ou de Nelligan pour les puristes- ravivent l’idée qu’il est toujours possible de créer des pièces bien rendues dans notre langue commune sans faire de la pop mielleuse. Leur style considéré comme du folk rock est un terme plutôt limitateur. Leur musique bien loin des Vincent Vallières et autres folk-stars au Québec à plus à voir avec la recherche musicale plus profonde et complexe des groupes post-grunge du milieu des années 90 comme Days of the New par exemple. C’est en réécoutant plusieurs fois leurs compositions -3ème spectacle d’Ours Blanc pour moi- qu’on en vient à la conclusion qu’au fond ce groupe fait du progressif-acoustique, style trop complexe pour les radios, et peu en demande chez les labels indépendants. Sans pouvoir trouver leur niche, ni dans la scène folk ni dans la scène rock, et encore moins dans la scène progressive, Ours Blanc se démarque avec un style bien à eux qui laisse présager un brillant avenir.

Nous attendons toujours avec impatience le premier E.P. du groupe dont la sortie est prévue pour février 2015. En attendant, le groupe fignole quelques nouvelles compositions avant d’entrer en studio.

Pour les curieux : http://www.oursblanc.bandcamp.com/

Texte : David Atman