POST-BATACLAN. IL FAUDRA S’Y FAIRE.

Il faudra s’y faire. Depuis le Bataclan plus rien n’est pareil. Une page a bel et bien été tournée. On vide ses poches et on se fait tâter. Ensuite vient la crainte qu’un piercing situé sur le bout du gland fasse sonner les détecteurs de métaux, et qu’on doive alors mettre cartes sur table afin de prouver son innocence. Rien pour rassurer les milliers de fans aux yeux rougis dans leur crise paranoïde.

Mais encore, ça va. On préfère toujours ça plutôt que de voir Maynard chanter dans une cage anti-balles. Enfin, ce long dithyrambe pour en arriver par dire que de se présenter une heure à l’avance ne suffit plus, de nos jours, pour pouvoir capter les premières parties d’un spectacle à grand déploiement.

LE TEMPLE

Première présence pour moi à la Place Bell de Laval. Ça a de la gueule. La bière et le stationnement sont hors prix, mais nous attendions nous au contraire? Le prix de la nourriture semble plus raisonnable. Le choix est plutôt vaste, qui aurait cru voir sur le menu d’un temple de la bière et du hockey, des sushis végétariens. En somme, c’est beau et propre et neuf, les bancs sont confortables, et surtout larges, symbole probable de l’américanisation de nos gros derrières. The Cure joue dans les haut-parleurs; l’ambiance annonce beaucoup.

MAYNARD EST PLUS COOL QUE TON EX

Tool était de passage en ville récemment. Un concert que plusieurs ont trouvé parfait, mais que d’autres, dont moi, ont particulièrement critiqué (manque d’énergie, sono déficiente, projections visuellement peu intéressantes). Nous attendons d’ailleurs toujours avec impatience le nouvel album, mais Maynard est occupé à faire de la tournée avec A Perfect Circle. Il nous annoncera d’ailleurs durant le spectacle qu’un album de APC verra le jour en 2018.

J’ai comme un peu le sentiment de me faire niaiser par une ex-copine qui ne sait pas trop ce qu’elle veut. On commence à être habitué avec Maynard.

Beaucoup de sièges vides, on s’imagine encore une longue horde de fans à l’extérieur se préparant toujours à se faire tâter jusque dans les coutures de son jacket.

LE CERCLE PARFAIT

Dès 21 h, le groupe prend possession de la scène et entame The Package l’une des pièces les plus importantes de leur répertoire. Derrière un immense voile, ce sont les ombres géantes des musiciens que nous apercevons en projection. Une scène magnifiquement réussie, donnant l’impression d’une grotte avec ses stalactites.

La musique est claire, juste, précise. À la première écoute, on se dit que le système de son dépasse en tout point celui du Centre Bell. La sono du concert de Tool était extrêmement brouillonne rendant à peine audible la voix de Maynard, ici, ce soir, tout au contraire la voix perce jusqu’au fond de l’amphithéâtre, on se demande même parfois s’il ne faudrait pas baisser son volume tellement elle est mise à l’avant-plan. Mais justement, personne ne s’en plaindra. Le groupe enchaîne plusieurs de ses succès durant le premier tiers du spectacle jusqu’à leur reprise, totalement unique, d’Imagine de John Lennon. Une petite accalmie au deuxième tiers de la soirée alors que le groupe interprète quelques pièces un peu plus mollement. On a vite l’impression d’être devant un peu de remplissage. Certaines pièces sont assez moyennes, il faut l’admettre. Avec seulement deux albums originaux, on ne pouvait s’attendre à deux heures de succès. Le dernier tiers du concert est venu rétablir les faits en démontrant tout le talent créatif et l’intensité d’un supergroupe comme A Perfect Circle. Une nouvelle pièce, très électro, voire quasi techno en a surpris plus d’un. Un moment qui m’a semblé étrange, un long long retour dans le passé dans la période de Filter, Orgy ou My Life with the Thrill Kill Cult. On se serait cru dans un remake du Corbeau (oh mais attend!?!). Après m’être gratté la tête deux minutes, un peu perplexe, j’ai fini par tout de même apprécier la pièce qui malgré son manque criant d’originalité propose un son différent de ce à quoi l’on pouvait s’attendre.

Le groupe était en forme. Maynard s’est beaucoup adressé à la foule en leur disant «talk to each other, you don’t even have to like each other, but talk to each other». James Iha aussi s’est adressé à la foule en déclamant son amour pour Montréal; la nature, l’air, les gens, et la poutine. J’aurais apprécié de le voir un peu plus en avant lors du spectacle, mais en somme ce fut un concert d’une grande intensité avec une mise en scène excessivement réussie.

Texte: David Atman

Photos: Sébastien Tacheron