Il y a longtemps que nous n’avions vu un aussi grand rassemblement de souverainistes de tout acabit réunis en un même lieu. Celui qui a rendu cela possible se faisait pourtant taxer de vouloir diviser. Dix ans après le décès de Pierre Falardeau, le personnage nous semble toujours aussi irrévérencieux et actuel. Musiciens, cinéastes, acteurs et politiciens allaient se présenter sur la scène de La Tulipe pour brièvement parler de l’artiste et y lire une bribe des nombreux écrits qu’il a réalisés tout au long de sa vie. Pierre-Karl Peladeau, Jean-Martin Aussant et Fred Dubé allaient entre autres se partager l’espace scénique, l’événement ratisse large et est toujours empreint d’un brin de folie et d’humour. Pierre-Karl Péladeau est d’ailleurs venu lire un texte de Falardeau publié en 2002 dans La Presse !?!?

Le cinéaste aura profondément marqué au fer rouge au moins deux générations de sa nation, et influencé une grande variété d’artistes contemporains avec son art mais surtout avec sa pensée politique. On se remémore, ce soir, l’éloquence et le charisme du bonhomme plus grand que nature drapé de chemise à carreaux et de bottes de construction. Falardeau, cet intello à grande gueule devenu célèbre pour ses comédies mettant en scène la colonisation de son peuple mais ce que l’on retiendra de lui malgré tout, c’est surtout le drame et le tragique de ses œuvres. Le rideau s’ouvre d’ailleurs sur le poème de Michèle Lalonde; Speak White, au détriment du « pasta dentale » ou du « spaghat à Linda ».

On se souvient de son soutien à tous les opprimés; les Palestiniens, les Nicaraguayens, les Algériens, avec lesquels il apprend, dans un autre contexte, sur la posture de l’opprimé. La spécificité du Québec n’est pas si distinctive que nous n’avons rien à apprendre des autres. Aujourd’hui, dix ans après son décès, on se souvient que son combat n’est jamais resté emprisonné entre ses frontières. Son engagement a toujours représenté son amour des autres.

L’événement est à la fois émouvant et comique. C’est par l’humour que s’exprime toute la tristesse des camarades de lutte et c’est précisément dans cette lutte que Falardeau se sentait en vie et y trouvait plaisir. Les gens réunis ont tous ce sentiment bien ancré au fond d’eux-mêmes. Le bloquiste Denis Trudel assume son rôle d’hôte avec brio. Jean-Martin Aussant nous aura démontré tout son talent de pianiste, Émile Bilodeau est venu mettre le party dans la salle avec une chanson inspiré du premier Gratton, alors que le grand sage Paul Piché aura démontré en deux pièces pourquoi il est toujours l’un des plus grands chansonniers francophones d’Amérique du Nord.

Falardeau aura assumé sa pensée jusqu’au dernier moment, il ne reste que nous pour continuer là où tout s’est arrêté.